L’Inde est la cinquième puissance économique mondiale, mais la 132ème en termes d’Indice de Développement Humain. La Thaïlande est un pays développé : c’est la 21ème puissance économique mondiale et son IDH est le 66ème.
Quel regard porte-t-on sur ces deux pays asiatiques ? Cette comparaison est personnelle, liée à notre vécu en 2024. Elle n’engage que nous.
Commençons par ce que l’on apprécie davantage en Inde du Sud :
L’accueil irréprochable des étrangers. Les Indiens ont beaucoup d’intérêt pour les visiteurs. Ils nouent le contact facilement et nous posent des questions, notamment « Do you like India ? ». Ils sont le plus souvent souriants, accueillants et gentils avec les étrangers. Et s’ils sont parfois un peu insistants dans leur regard, ils savent aussi mettre fin à une conversation au bon moment avec une phrase courte et assertive. En Thaïlande, la moitié des interactions sont commerciales et sans humanité. Dans les magasins, les temples, au restaurant ou dans les lieux publics : ils regardent souvent des vidéos sur leur téléphone, sans le moindre intérêt pour les visiteurs. Dans la montagne, on a tout de même trouvé davantage de sourires et de bienveillance.
L’émerveillement des Indiens. On le découvre à Hampi, lorsque des dizaines d’Indiens nous parlent et nous prennent en photo. On a l’impression qu’ils découvrent des yeux bleus et des cheveux blonds pour la première fois. Ils aiment se prendre en photo avec des appareils photos souvent de mauvaise qualité et ils adorent faire des montages sur Instagram que l’on faisait il y a 15-20 ans en France. Lorsqu’ils voient notre iPhone, petits et grands veulent connaître le modèle exact avant d’exprimer un « Woow ». Il y a aussi nos photos de la neige ou de chihuahua… leur réaction est souvent pleine d’émerveillement.
Une culture et un mode de vie différents où l’on doit tout apprendre. La première visite d’un temple hindou est une expérience en soi : on ne sait pas où se mettre, comment se vêtir, que faire et ne pas faire. Parfois, un Indien va vous aider. D’autres fois, vous ferez au mieux en suivant la foule. Il en va de même pour prendre le bus, le train, trouver un repas ou des toilettes dans un petit village. Nos repères ne servent plus à grand-chose. On cherche et on apprend par l’expérience à naviguer dans ce monde différent. Ce n’est pas aussi simple que dans nos sociétés modernes et capitalistes. Tout n’est pas accessible facilement, on doit d’abord comprendre leur système. C’est génial.
L’absence de gêne. L’Inde est souvent chaotique, mais l’on peut tout faire. En Thaïlande, nous avons été embêtés dès le premier jour par les voisins qui étaient dérangés par la cigarette et par un doigt pointé dans la direction de leur maison. La Thaïlande est plus policée, codifiée. Il y a davantage de respect, de gêne entre les gens, et donc moins d’interactions. Ce point nous a parfois énervé en Inde, mais il rend la prise de risque plus simple. On peut tenter des choses sans craindre de déranger, de vexer ou de se tromper. On apprend à s’affirmer et à avoir un discours assertif pour obtenir des choses. L’absence de gêne est un cadeau pour nous qui craignons de déranger et qui nous excusons souvent.
Les couleurs. Les femmes portent des saris de toutes les couleurs. On repense à nos trajets dans un train en Inde : les couleurs nous sautent aux yeux. Même si des magasins de « Western clothes » sont à la mode, les traditions perdurent pour la majorité des gens. Le contraste est saisissant avec notre voyage en train en Thaïlande : les habits sont sombres et sobres.
Mais alors, est-ce que la Thaïlande a davantage retenu notre attention sur d’autres points ?
La nourriture. On apprécie beaucoup après 10 semaines en Inde de découvrir un choix vaste de plats, arrivant à table rapidement. La nourriture indienne est très savoureuse, mais elle est souvent trop épicée et les choix sont limités dans les restaurants. Dans un village, on a régulièrement le choix entre un biryani épicé et un thali épicé. Sans couverts. Supplément « lemon pickle » très épicé fourni. Même si l’on apprécie l’aventure à chaque repas, on apprécie peut-être davantage la cuisine raffinée et le vaste choix en Thaïlande.
Les lessives. Peu importe où vous êtes en Thaïlande, vous pouvez donner votre sac et le récupérer le lendemain plié et repassé pour 1€ le kilo de linge. En Inde, on devait souvent planifier notre lessive, s’occuper nous même de nos sous-vêtements et parfois même de la lessive chez notre hôte. La plupart du temps, ce n’était pas évident.
Le développement et la similitude de nos modes de vie. On a davantage de repères. Même si les salaires restent bas, l’économie est similaire à celle de l’Amérique. Les magasins sont nombreux et ils ont des horaires. On peut se faire masser ou profiter de l’air conditionnée dans un joli restaurant n’importe où. La vie est plus carbonée et donc plus agréable, plus simple.
La richesse culturelle et la beauté des constructions humaines. Le nombre de temples en Thaïlande est impressionnant. Leur beauté l’est tout autant. Rien que dans la petite ville de Chang Rai, on découvre six temples magnifiques et tous uniques. Et il y en avait encore des dizaines à découvrir. Le beau en Inde est d’une autre nature, il est moins évident que dans les constructions thaïlandaises.
La spiritualité. En Inde, la spiritualité est bruyante dans toutes les religions. Certains sont sur des éléphants. Le don peut être exigé sans retenu ou scrupule pour une bénédiction faite à la va-vite. Les rituels sont plus excentriques : 22 sauts d’eau versés sur notre tête, un éléphant qui récupère l’argent des fidèles, ou encore un bindi mis sur le front de manière brusque, à la chaîne car la queue est sans fin. En Thaïlande, la spiritualité est plus calme, intérieure. Il est vrai que certains temples sont remplis d’argent et ressemblent à des parcs d’attraction avec momies qui bougent toutes seules, sky walks et urnes à dons dans chaque recoin. Mais, dans tous les temples, le calme règne. Le moine nous bénit calmement et nous remet doucement un bracelet. On peut méditer dans un cadre harmonieux mêlant un bel édifice, la faune et la flore. La découverte du bouddhisme est paisible, intrigante et plus douce que l’hindouisme indien.
Au-delà des différences, ces deux pays se rejoignent sur leur atteinte à l’environnement. En Inde, le plastique à usage unique est partout et la majorité des déchets finissent dans la nature. J’ai été très surpris en voyant un Indien se lever dans le train avec son biryani sur une assiette en plastique : il l’a jeté par la porte ouverte, sans pression. Un homme avec qui je discutais lui avait montré la poubelle du doigt, mais son habitude était trop ancrée. En Thaïlande, les quantités de plastique sont astronomiques. Les véhicules sont gros et polluants. Ils roulent très vite, tout ça pour s’arrêter à un feu quelques mètres plus loin. Les villes se développent à l’américaine : une grande artère avec des magasins-entrepôt et des stations-service. L’environnement n'a pas l'air d'être un sujet. Le développement asiatique est signe d’enrichissement et d’une meilleure stabilité financière, peu importe les conséquences sur la nature.
Finissons par une différence notable et amusante entre les deux pays : leurs expressions du visage et du corps. En Inde, le mouvement de tête demande une attention particulière et des heures de pratique avant d’être compris. Il veut parfois dire oui, parfois non, selon le contexte et la personne qui le fait. En Thaïlande, on découvre l’inclinaison du corps avec les deux mains jointes devant le cœur. Ce geste est notamment utilisé pour se dire bonjour et merci. Dans les deux pays, on apprend au fil des interactions à interpréter les gestes de nos interlocuteurs.
La version indienne.
L’Asie est d’une grande diversité. Ces deux pays proches géographiquement sont radicalement différents. Leur mode de vie et leur rapport à l’autre n’ont pratiquement rien à voir. Notre regard de voyageur est fasciné par l’Inde. Le pays nous appelle déjà. Nous souhaitons découvrir l’atmosphère du Nord et les contrées himalayennes. Nous souhaitons revivre des moments exceptionnels, hors de notre cadre de référence. Si nous revenons en Thaïlande, ce serait plutôt pour des vacances plus tranquilles à la découverte de la région moins touristique d’Isan. Peut-être accompagné d’enfants ?
Super article très intéressant